Ludovic "Killing" Audant ou La Passion du Ciel palmeiras não tem mundial

Gilles Hudicourt

Après la parution du premier numéro de Genèse, journal virtuel de l'Association de Généalogie d'Haïti, je me suis engagé auprès de Mme Fourcand, coordinatrice en titre de ce journal, mais en réalité «pòto mitan 1», à rédiger un article pour le second numéro. J'étais à réfléchir sur le thème à traiter jusqu'au jour où je reçus un courriel de Richard Audant qui m'écrivait parce qu'il avait été surpris de trouver la généalogie de sa famille sur le site Web de l'Association de Généalogie d'Haïti.

Richard a tout de suite capté mon intérêt puisqu'il est le fils d'un pilote du Corps d'Aviation des Forces Armées d'Haïti, pilote dont j'avais entendu parler dans le cadre de mes recherches généalogiques : Ludovic Audant, dit Killing. Or l'aviation est, depuis ma plus tendre jeunesse, ma grande passion. Les héros de mon adolescence étaient des hommes tels que le Baron Manfred Von Richtofen, Charles Lindbergh, Jimmy Doolittle, Chuck Yeager, Saburo Sakaï, Adolf Galland. Une de mes émissions de télévision préférées était 12 O'Clock High. J'ai poussé mon père à traverser tout Hong Kong en taxi en 1971 pour m'emmener voir le film Tora Tora Tora sur l'attaque japonaise de Pearl Harbour. Nous arrivions de Suisse où je n'avais pu le voir car il était interdit aux moins de 16 ans. J'avais 10 ans.

La généalogie n'a été dans ma vie qu'une maîtresse tardive et presque accidentelle. J'ai téléphoné à Richard Audant. Au cours de notre conversation, j'ai laissé la généalogie de côté pour questionner Richard au sujet de son père et de la carrière de celui-ci. Richard, tout en répondant de bonne grâce à mes questions et constatant mon intérêt, m'apprend qu'il possède quelques photographies de son père ainsi que son carnet de vol de pilote. Il m'a envoyé les photos par courriel. Une d'entre elles était celle d'une escadrille de pilotes militaires noirs. Une escadrille de Tuskegee Alabama !? Lorsque l'image de Ludovic Audant, un Haïtien de Jérémie, debout parmi les célèbres Tuskegee Airmen m'est apparue à l'écran, j'en ai eu la chair de poule. Je tenais le sujet de mon article ! De Killing Audant, je ne possédais que quelques bribes d?informations. Il était de Jérémie, avait été pilote, pilotage qu'il avait appris à Tuskegee. Mais cela me suffisait. J'allais pouvoir disserter sur une question qui relie mes trois passions (non charnelles, je dois préciser) : l'aviation, l'histoire et la généalogie. J'espère que vous apprécierez.

Chez le Général Audant à Jérémie.

Ludovic Audant est né le 12 octobre 1911 à Jérémie, Haïti. Il était le sixième des huit enfants du général Chenier Audant et de Marguerite Lestage. Le général Chenier Audant était l'un de ces officiers de l'ancienne armée d'Haïti, celle d'avant l'occupation américaine de 1915, époque où chaque ville, pour ne pas dire chaque bourgade, possédait un ou plusieurs généraux à épaulettes, boutons dorés et sabre. Ces généraux n'avaient sous leurs ordres qu'un lieutenant, quelques sous-officiers et une poignée de misérables soldats conscrits, allant nu-pieds et dépenaillés, touchant la solde selon le bon vouloir du grand argentier de l?armée. La vie du général était tranquille, même si le gouvernement de la distante capitale se faisait renverser chaque année. Son devoir consistait à garder les boutons de son uniforme brillants et ses compatriotes dans l'ordre. Il se ralliait spontanément aux divers coups d'état, un commerce qu'avaient jadis souvent pratiqué des citoyens de la Grand?Anse mais qui, depuis un certain temps, était devenu l?apanage des habitants du Nord-Est. C'était peut être preuve de sagesse : la politique amenait parfois prestige et fortune à ceux qui la pratiquaient mais c'était d'habitude de courte durée : une fois que les cartes étaient brassées, il s'ensuivait invariablement ruine, deuil et exil pour les déchus et leur entourage. En restant à l'écart de la politique, il maintenait la paix à Jérémie.

Chenier Audant est lui-même né à Jérémie le 25 juillet 1876. Ses parents possédaient plusieurs petites maisons au bord de mer, près de la jetée de Jérémie, propriétés héritées par la suite par Arthur et Camille Audant, cousins de Ludovic. La famille Audant était réputée «indienne» à cause des cheveux d'un noir jais mais lisses qui caractérisaient tous les membres de cette famille, même ceux, comme Ludovic, qui étaient de teint plutôt foncé. Chenier avait deux s?urs, Audanette et Cécile qui, restées célibataires, enseignaient le catéchisme chez elles. La famille Chenier Audant vivait près du marché «Sirop», à coté des Dumas dont certains disaient qu'ils étaient de quelque façon apparentés à Alexandre Dumas Thomas-Alexandre Davy Dumas (1762-1806) est né dans le canton de la Guinaudée, dépendance de la paroisse de Jérémie. Il est parti pour la France alors qu'il n'était encore qu'un enfant. Il n'est jamais retourné en Haïti. Son fils, l'écrivain Alexandre Dumas, père (1802-1870), son petit-fils l'écrivain Alexandre Dumas, fils (1824-1895) n'ont pas, à notre humble connaissance,foulé le sol d'Haïti. Il serait, toutefois, intéressant de chercher à savoir l'origine de cette famille Dumas à Jérémie en 1910">2. Chenier a reçu une éducation soignée et une formation scolaire qui ne semble pas avoir dépassé le niveau du secondaire. Le passage d'état d'élève de terminale à celui de général a dû se faire de manière assez typique pour cette époque d'Haïti.

L'épouse de Chenier Audant, Marguerite Lestage, née à Jérémie le 7 février 1878, était d'une vieille famille de la Grand?Anse, fille de Hugues Lestage, avocat, et d'Udovia Cuvier, des Abricots. Elle était aussi la petite-fille du «Baron» Gilles Laurent Lestage 3. La famille Audant vivait des appointements militaires de Chenier et de ceux de Marguerite, qui formée au pensionnat des s?urs de Sainte-Rose-de-Lima à Port-au-Prince, avait un poste au gouvernement dans le domaine de l'éducation en plus de posséder sa propre école secondaire pour jeunes filles. Cette école était fréquentée par toutes les demoiselles de l'élite jérémienne au tournant du vingtième siècle. Marguerite donnait aussi des leçons sur le piano familial. Ludovic Audant apprit très jeune de sa mère à jouer cet instrument. Lorsque les Américains envahirent Haïti en 1915, l'ancienne armée haïtienne fut dissoute (une première fois) et Chenier perdit sa situation. Les 8 enfants Audant avaient alors entre 1 et 12 ans. La lourde responsabilité d'une famille nombreuse retomba intégralement sur les épaules de Marguerite, désormais seule soutien financier de la famille. Pour subvenir aux besoins, Marguerite dut vendre une à une les maisons et propriétés héritées de son père, maître Hugues Lestage, ou encore données par sa mère, Udovia Cuvier, encore en vie à l'époque. Celle-ci possédait encore des biens laissés par son mari mais exploitait aussi une boulangerie aux Abricots, sa ville natale où elle demeurait. Les enfants Audant allaient souvent passer des vacances chez leur grand-mère aux Abricots, village pittoresque à la plage d'un sable très blanc, situé à l'ouest de Jérémie. Au bout de quelques années, Marguerite voyant son héritage fondre comme beurre au soleil, décidait de déménager sa famille à Port-au-Prince. Elle partit en laissant à son mari les plus jeunes de ses enfants. Ils ne devaient la rejoindre que quelques années plus tard. Ce furent des années difficiles pour la famille.

Le rêve prend forme.

Vers 1921, toute la famille se trouvait à Port-au-Prince où, toujours, Marguerite Lestage subvenait seule aux besoins de sa famille en jouant au piano au Ciné Parisiana. C'était l'époque où les films, encore muets, étaient accompagnés par la musique d'un pianiste. Ludovic, arrivé à l'âge du secondaire, fut inscrit au Collège du Petit Séminaire St-Martial où il termina ses études. La famille avait à peine de quoi survivre, aussi dès que Ludovic fut assez vieux, il alla lui aussi jouer du piano, mais au Ciné Variétés, lors des matinées de cinéma. Ce serait à cette époque que Ludovic aurait été surnommé «Killing», car «li té konn touyé moun ak blag» 4. Il aimait beaucoup le sport, d'abord le football puis le tennis qu'il a pratiqué toute sa vie.

Le Général Chenier Audant devait mourir le 18 mai 1936 sans avoir jamais obtenu un emploi conséquent à la Capitale. Sa carrière de Général dans l'ancienne armée haïtienne ne l'avait en rien préparé à la vie dans un Port-au-Prince dépourvu de guerres civiles, de complots et de coups d'état.

Des enfants de Chenier, Lys, le troisième enfant, fut le premier a embrasser la carrière militaire, vers 1926, dans la nouvelle garde d'Haïti, formée, entraînée et encadrée par le United Sates Marine Corps (U .S .M .C.), (les troupes de marine), mais il n'y resta pas longtemps. Il devint mystérieusement fou quelques années plus tard en même temps que plusieurs de ses collègues officiers.

Ludovic rêvait de son coté de devenir pilote et allait mettre tous les moyens en ?uvre pour y parvenir. Je ne peux que spéculer sur ce qui a pu entraîner Killing Audant à embrasser une carrière en aviation mais certains événements qui ont fait la une en Haïti ont certainement dû contribuer à faire naître cette passion chez lui.

C'est le (U .S .M .C.) qui apporta les premiers «aéroplanes» en Haïti, les premiers sous forme d'hydravions à coque qui étaient basés à Bizoton, à l'emplacement actuel des Gardes Côtes d'Haïti. Leur mission était de patrouiller l'intérieur d'Haïti afin de repérer les «Cacos 5» qui commençaient à donner du fil à retordre aux forces d'occupation américaines. Des avions sur roues, plus efficaces et armés de mitrailleuses furent importés plus tard, ce qui porta les Américains à aménager des terrains d'aviation dont celui de Chancerelles, près du Pont Rouge, auquel ils donnèrent le nom de Bowen Field 6, nom qu'il garda jusqu'à sa fermeture. La navigation aérienne au plan technologique avait fait un bond énorme entre les années 1914 et 1918, lors de la Première Guerre mondiale. Dès la fin des hostilités, des milliers d'avions, surplus de guerre, machines jusque là d?un prix inabordable, se retrouvèrent sur le marché pour des montants dérisoires. Cette abondance d'appareils transforma une activité jusque là réservée aux suicidaires en un hobby pour aventuriers très courageux.

En 1928, lorsque Killing avait 16 ans, Charles Lindbergh, qui venait quelques mois auparavant de faire sa célèbre traversée de l'Atlantique, atterrit à Bowen Field avec son fameux avion, Le Spirit of Saint Louis. Le gouvernement Haïtien décréta un jour férié pour l'occasion et une foule délirante acclama le célèbre aviateur qui défilait à travers les rues de la capitale dans une voiture décapotable. L'Union Patriotique décria cette visite comme une man?uvre de propagande de l'occupant qu'il fallait boycotter mais souligna que son mot d?ordre ne diminuait en rien, par là, au mérite de l'aviateur 7. Quatre ans après la première visite de Lindbergh, en 1932 (Ludovic a maintenant 20 ans) un autre événement relié à l'aviation fit la une à Port-au-Prince. Léon Désiré Paris, un Haïtien qui avait appris à piloter à New York, atterrit à Bowen Field aux commandes de son propre avion, baptisé le Toussaint Louverture. Il l'avait piloté depuis New York, une véritable péripétie considérant le contexte de l'époque. Ce voyage avait nécessité des dizaines d'escales dans le Sud des états-Unis et à Cuba. Imaginez donc un nègre francophone, aux commandes d'une machine volante, qui se pose en pleine période de récession, dans le champ d'un fermier de Virginie en 1932 et qui demande au fermier blanc s'il peut le conduire en ville dans son camion afin de remplir son bidon de 5 gallons d'essence. Lors d'un de ces arrêts, Léon Paris fut presque lynché et n'eut la vie sauve que grâce à l'intervention de son copilote, un blanc, qu'il avait eu la sagesse d'emmener pour ce voyage. Comme si piloter un de ces appareils si peu fiable sur une si grande distance n'était pas un risque suffisant, il fallait encore que Léon Paris 8, à chaque arrêt, risquât de se faire lyncher par le Ku Klux Klan.

Comment Léon Paris et Ludovic Audant devinrent amis, je l?ignore, mais il est certain que Paris et Killing le furent et que Paris encouragea Killing à partir aussi pour New York pour devenir pilote. Contrairement à Charles Weymann, Killing n'avait pas de parents riches pour financer son entreprise. Sa s?ur Marie Antoinette Audant, jeune mariée à l'époque, et son ami Edwig Mercier furent de ceux qui l'aidèrent à financer son voyage et ses études.

Le jazz, les avions et les belles causes.

Il se retrouva vers 1937 à Brooklyn, à Floyd Bennet Field plus précisément, où il étudia pour obtenir son brevet de pilote privé qu'il décrocha en 1939. Son fils, Richard, le possède encore. Il dut, pour subvenir à ses besoins, travailler comme aide cuisinier pour le compte d?une grande chaîne américaine spécialisée en restauration rapide, les McDonald de l'époque. Il a souvent parlé à ses enfants du nombre de pommes de terre qu'il a du peler dans sa vie afin de payer ses cours. à New York, Killing découvre le jazz et ne tarde pas à mettre ses talents de pianiste au service des boîtes de nuit de Harlem et de Brooklyn. Il s'en est fallu de peu qu'il laissât tomber l'aéronautique pour devenir musicien de jazz.  Lorsqu'il médite sur les nuits blanches associées à la vie de musicien, il renvoie manu militari la sirène dans les fosses abyssales de la mer. Le jour, dans le ciel et la nuit dans son lit ! Il gardera toutefois un amour éternel pour le jazz et particulièrement pour Duke Ellington et Louis Armstrong

Au moment même où Killing obtenait son brevet à New York, la Deuxième guerre mondiale éclatait en Europe. Les états-Unis ne devaient entrer en guerre qu'en décembre 1941 mais le Canada, fidèle à son Roi, entre en guerre dès l'éclatement des hostilités en 1939. On venait de vivre la Guerre d'Espagne, période où des milliers de jeunes idéalistes du monde entier s'étaient précipités en Espagne pour s?engager dans les Brigades Internationales afin de s'opposer au fascisme. Killing se précipite alors au Canada où il va offrir ses services de pilote à la Royal Canadian Air Force (RCAF). Est-ce à cause de son état de nègre, de son statut d'étranger, où à ce stade initial de la guerre, le Canada ignore-t-il encore à quel point il aura besoin de pilotes, on ne sait, mais toujours est-il que Sa Majesté refuse les services de Killing qui, déçu entre en Haïti 9.

Killing, Officier de la Garde d'Haïti.

La guerre ayant éclaté en Europe, les états-Unis décident de moderniser l'armée de ses pays satellites, en l'occurrence Haïti, dont l'armée était déjà le rejeton du U.S.M.C, qui n'avait laissé Haïti que 5 ans plus tôt. Les officiers hauts gradés de la garde d'Haïti sont donc biens connus des Américains dont ils ont été les élèves. Un des aspects de cette modernisation est la création du Corps d'Aviation de la Garde d'Haïti. Une mission militaire américaine fut envoyée en Haïti afin de créer ce corps. C'est dans ce contexte que notre Killing Audant arrive des États-Unis. Il s'engage dans l'armée haïtienne pour faire partie de ce nouveau corps d?armes. Son ami Léon Paris désire en faire partie également, mais n'arrive pas à se faire admettre. Il semble qu'il y a opposition de la part d'Edouard Roy, l'officier désigné pour devenir le premier commandant du Corps d'Aviation. Léon Paris avait pourtant été le pionnier de l'aviation en Haïti 10. Les Américains qui ont besoin d'un aéroport moderne à Port-au-Prince pour servir de lieu d'escale à leurs transports C-47 (Dakota, DC3 militaire) en route pour l'Afrique du Nord via l'Atlantique Sud, construisent le premier aéroport moderne d'Haïti sur le site de l'ancienne piste de terre du U.S.M.C., Bowen Field. Ils y tracèrent une piste en asphalte de 5000 pieds, balisée pour les opérations de nuit, avec tour de contrôle, radioélectriques à la radionavigation pour les atterrissages par mauvais temps, groupe électrogène, etc. Bowen Field est ouvert au trafic 24 heures sur 24 durant toute la durée de la guerre et des transports militaires américains y font escale régulièrement.

Killing mécanicien.

En 1942, Killing Audant est envoyé avec trois autres officiers Haïtiens à Newark, New Jersey, pour y suivre des cours de mécanique d'aviation à la Casey Jones School of Aeronautics 11 où une grande partie des officiers mécaniciens aéronautiques de l'armée américaine est formée . De retour en Haïti, Killing Audant reçoit quelques cours de pilotage à Bowen Field et effectue d'autres vols en «solo» à bord de petits appareils d'entraînement légers, des Luscombes. à peine rentré au Pays, il est envoyé à Tuskegee Alabama pour y recevoir une formation de pilote militaire.

Le Tuskegee Institute.

Le Tuskegee Institute qui tient son nom de la ville d'Alabama où il se trouve est un collège pour noirs fondé au tournant du 20è siècle par Booker T. Washington. Au cours des années 30, un des pionniers noirs de l'aviation américaine, Alfred Anderson, avait parcouru, avec les risques que l'on sait, les états-Unis et l'Amérique Latine à bord de son avion. Il fit tant parler de lui et de sa race qu'il reçut même une décoration du gouvernement haïtien le 16 novembre 1934. Cet Alfred Anderson approche la direction du Tuskegee Institute pour inciter cette école à offrir aux jeunes noirs un programme de formation en pilotage : elle accepte. C'est la naissance du Tuskegee Institute Flying School. à la même époque, un jeune noir américain, Yancy Williams, étudiant de Howard University, intente un procès contre le War Department (Ministère de la défense) qui ne veut pas accepter sa candidature comme pilote militaire. On lui avait répondu qu'il n'existait pas de programmes de formation pour coloured. L'affaire fait scandale. Les noirs trouvent des gens qui défendent leur cause dont le sénateur Harry Truman. Le War Department, embarrassé par cette mauvaise publicité décide à la hâte de créer un programme de formation pour pilotes militaires de couleur. On décide de réquisitionner le Tuskegee Institute Flying School pour cela, mais il faut au préalable que celui-ci améliore ses installations encore assez rudimentaires. Il faut des fonds. L'école s'adresse à une fondation dont un des membres du conseil est Mme Roosevelt, la «First Lady». Elle se rend à Tuskegee pour voir comment le conseil d?administration entend gérer les subventions sollicitées. Elle sait que le conseil dont elle fait partie est très sceptique à l'idée de nègres aviateurs. De son coté, le War Department souhaite secrètement que l'expérience serve à prouver que les nègres sont incapables de piloter des avions de chasse. Mme Roosevelt alarme son entourage lorsqu'elle demande au célèbre nègre Alfred Anderson de l'emmener faire un tour en avion. Celui-ci s'exécute illico, sous les yeux ahuris et incrédules de son entourage. Il ramène à terre une Mme Roosevelt ravie et les fonds furent versés. Les états-Unis entrent en guerre fin 1941 et Tuskegee devient vite une base militaire permanente. Les futurs pilotes sont recrutés parmi la crème des universitaires noirs américains, puisqu?il faut être universitaire pour être officier. Lorsqu?ils ont achevé leur formation de pilote, ils sont nommés officier. Ces hommes arrivent contre vents et marées, déterminés à prouver à leurs proches, à leurs supporters et surtout aux racistes du monde entier (qui sont persuadés que ces nègres vont démolir les avions des contribuables américains et se faire abattre comme des mouches par l'ennemi) qu'ils sont les égaux des blancs. La seule façon de faire cela sans équivoque était de faire mieux que les blancs. Les Tuskegee Airmen ont du se battre pour être acceptés comme officiers, ont du se battre pour réussir leur formation de pilote, et voilà qu'à la fin ils doivent encore mener une autre bataille, politique celle-là, pour avoir le droit et l'honneur d'aller servir au front, pour une patrie, qui en grande partie, ne voulait pas d'eux comme soldats. Le War Department ne veut rien savoir mais ployant sous la pression, finit, par les envoyer près du front, en Afrique du Nord. L'ennemi, donc les Allemands, allaient être les premiers protagonistes de cette histoire à apprendre, à leurs dépens il est vrai, qu'il fallait traiter les aviateurs du Tuskegee avec le plus grand respect.

Les dossiers du Tuskegee Institute Flying School indiquent «que de 1942 à 1946, ils ont formé 650 pilotes de chasseurs, 217 pilotes de bombardiers, 60 pilotes auxiliaires 12 et 5 haïtiens

Durant la Deuxième guerre mondiale, 450 pilotes noirs de Tuskegee ont été envoyés au combat en Afrique du Nord et en Europe. La première formation, le 99th Poursuit Squadron (99è escadrille de chasse) est constitué de vieux chasseurs P-40 démodés dont les blancs ne voulaient plus (donc les seuls que le War Department veut bien risquer pour l'expérience). Il est affecté à l'attaque d'objectifs au sol, une anomalie voulue. Pour des pilotes de chasse, il n'y avait pas d'avions à chasser ! Cette escadrille est rejointe plus tard par les promotions successives de Tuskegee, les 100è, 301è et 302è Squadrons, équipés, de chasseurs P39, et plus tard de chasseurs modernes P-47, P-51. Ces 4 escadrilles forment ensemble le 332è Fighter Group qui se retrouve très vite dans la campagne d'Italie où il lui est enfin confié des missions d'interception et d'escorte de bombardiers. Ces 450 pilotes ont détruit 261 avions allemands, plus de 600 locomotives et wagons de chemin de fer, coulé 1 contre-torpilleur allemand et plus de 40 autres bâtiments de surface, mais leur plus haut fait de guerre est que lors de plus de 200 missions d'escorte de bombardiers de la 15th Bomber Group au-dessus de l'Allemagne et de l'est de l'Europe (pilotés pas des blancs), les Tuskegee Airmen n'ont jamais perdu un seul des bombardiers qu'ils escortaient au feu des chasseurs ennemis. De fin 1943 à mai 1945, 66 Tuskegee Airmen ont été tués au combat et 32 autres ont été abattus et se sont retrouvés prisonniers de guerre des Allemands. Les Tuskegee Airmen ont été surnommés les «Red Tailed Angels» par les équipages des bombardiers qu'ils escortaient car l?arrière des fuselages de leurs avions étaient tous peints en rouge, de façon à ce que tout un chacun, amis comme ennemis, puisse les reconnaître. En 1944 et 1945 il arrivait souvent que les chefs d'escadrille des bombardiers américains exigent, pour une mission particulièrement dangereuse au-dessus de l'Allemagne, d'être escortés par les avions aux queues rouges. L'un de ces pilotes qui avait beaucoup apprécié la protection des Tuskegee Airmen était l'ex sénateur et candidat à la présidence américaine en 1972, George McGovern.

Leur performance n'a pas du tout été étrangère à la loi, promulguée en 1948 par Harry Truman, devenu président, interdisant la ségrégation dans l'armée américaine. Des vétérans de Tuskegee de la Deuxième Guerre mondiale se sont retrouvés pilotes durant la guerre de Corée et au Vietnam, cette fois au côté des blancs, et c'est un Tuskegee Airmen qui est devenu le premier général noir de l'armée de l'air des états-Unis et le second général de toutes les Forces armées des Etats-Unis : Benjamin Oliver Davis Jr 13.

C'est donc parmi ces hommes que nous retrouvons notre Ludovic Audant debout ce jour de 1943. Il se retrouve entouré d?individus brillants qui jouent aux cartes le soir avant de se coucher paisiblement tandis que lui doit rester debout tard dans la nuit avec ses livres. Il était parmi des hommes qui devaient leur présence à Tuskegee à leur excellence, leur désir de réussir, des hommes qui avaient des années de progression à contre courant dans leur portfolio. Killing arrivait par contre d'un pays où il était un privilégié, où son désir de devenir pilote était perçu comme un caprice d'enfant gâté. Pourquoi ne devenait-il pas médecin, avocat, agronome ou ingénieur comme les autres de son entourage ? Par contre, la responsabilité qui pesait sur ses épaules en cas d'échec devait être la même que pour ses camarades américains. Il ne pouvait être question d'échec. Killing reçoit sa formation initiale sur des avions BT-17 (Basic Trainer). Là où il a le plus de mal, c?est en formation théorique. La formation pratique sur avions lui est facile : contrairement à la plupart de ses camarades américains, Killing sait déjà piloter. Il termine sa formation sur AT-6 (Advanced Trainer). à la fin de 1943, Ludovic Audant reçoit ses ailes avec une mention comme «outstanding student» (excellent élève) de la part de ses instructeurs. Il retourne à ce moment retrouver ses camarades du Corps d'Aviation en Haïti. A-t-il encore une fois tenté de se faire recruter pour aller au front en Europe ? Je ne le pense pas car sa qualité d'officier d'une puissance amie aurait empêché son recrutement par les Américains qui voulaient de lui à Haïti pour former les Corps d'Aviation, un projet américain. De toutes les façons, les Américains faisaient à ce moment encore tout leur possible pour empêcher leurs propres noirs de se rendre au front, allez voir les nègres du voisin. Du moins en tant qu'officier-pilotes. En tant qu'aides cuisiniers à la rigueur...

La Cohata.

À son arrivée en Haïti, Killing est tout d'abord affecté au service de patrouilles aériennes le long des côtes haïtiennes à bord de petits avions Luscombes. Haïti reçoit ensuite des Vultee BT-13 (presque le même appareil que BT-17) et des North American AT-6 neufs, les mêmes avions qu'employait le Tuskegee Institute et toutes les unités de formation de l'armée américaine. Killing entraîne les nouveaux pilotes haïtiens à bord de ces avions et continue le service de patrouille. On décide alors de former la Cohata, la Compagnie Haïtienne de Transport Aérien, un service aérien qui relierait entre elles les villes d'Haïti, service commercial qui serait exploité par le corps d'aviation mais offert au grand public. Ce service a été inauguré tout d'abord avec des avions légers, des Luscombes, tout à fait inadéquats pour ce service. C'est au retour d'un tel voyage des Cayes que Ludovic, seul à bord, s'est retrouvé par mégarde dans des nuages, ce qu'on appelle «aux instruments». Le problème, c'est des «instruments» en question, son avion n'en était point pourvu. Il a fini, sans idée exacte de sa position, par heurter une montagne au morne Campan, au sud de Léogane. Il s'est retrouvé assommé et a été secouru par des habitants de la région. C'est de cet accident que Ludovic hérita la cicatrice au front qu'il porta jusqu'à sa mort.

Un peu plus tard, vers la fin de la guerre, de 30 places pratiquement neufs pour assurer le service régulier entre les villes des provinces. Des pistes sont construites ou agrandies sur tout le territoire afin de pouvoir mettre en ?uvre le projet arrêté. Les villes de Jacmel, Cayes, Jérémie, Port-de-Paix et Cap-Haïtien sont les premières à goûter les bienfaits de l?évolution aéronautique. Au cours des années des pistes existent à Miragôane, à Saltrou, à Anse d'Ainault, Anse-à-Galets à la Gonave, Môle-St-Nicolas, Gonaïves, Hinche, Belladères, Mirebalais, St-Raphaël, Jean-Rabel, Pignon, Ouanaminthe, La Tortue, Ft-Liberté, Dérac. Le Corps d'Aviation a desservi toutes ces villes durant des années et en toute sécurité"> 15. Les quelques accidents enregistrés ont surtout impliqué les avions de type militaire, sans passagers. Le Corps d'Aviation a aussi acheté un quadrimoteur de type Douglas DC-4 avec lequel il effectuait des missions à travers tout le bassin des Antilles et l'Amérique Centrale. Les DC-3 se rendaient aussi à l'étranger de temps à autre, pour emmener notamment l'équipe nationale de football dans les pays où elle devait jouer. Tout de suite après la guerre et au cours des années 50 la Cohata avait des appareils modernes comparables à ceux qu'utilisaient à cette époque les grandes compagnies aériennes du monde. Les pilotes étaient des hommes compétents, bien formés et sérieux. Durant ces années, elle a transporté sur le réseau interne d'Haïti un nombre de passagers jamais égalé jusqu'à ce jour. Il est vrai que le réseau routier d'Haïti était exécrable et que les villes de province possédaient encore une économie vivante, ce qui n?est hélas plus vraiment le cas aujourd'hui.

Ludovic Audant a donc été un pilote régulier au Corps d'Aviation de 1942 jusqu'au début des années 60, presque vingt ans. Il a piloté autant les avions de transport de la Cohata que les divers avions de type militaire à hélices que l'armée d'Haïti a possédé au cours des ans. Il se marie le 28 mai 1955 à Mireille Dévieux, de Petit-Goâve. Il a 43 ans. Il aura deux fils de Mireille, Richard et Pierre.

Vers la fin des années 50, Ludovic a la tristesse de voir le Corps d'Aviation se détériorer, de voir les appareils et les installations vieillir sans être renouvelés. Le DC-4 fut vendu. Les événements politiques de 56 et de 57 n'ont rien fait pour améliorer le sort des officiers de carrière de l'armée. Il eut des luttes intestines. Un DC-3 de La Cohata a été victime d'un détournement lors d'un vol régulier interne. Les pirates étaient des officiers de l'armée d'Haïti, des camarades donc, qui voulaient s'enfuir à Cuba. Le pilote aux commandes, Guilbaud, un jérémien comme Ludovic Audant, refuse d'obtempérer. Il est abattu aux commandes même de son avion, en plein vol, et le copilote file vers Cuba. Après 15 ans de service, Audant était encore simple lieutenant : les promotions allaient plutôt aux intrigants et aux flatteurs, des catégories d'hommes dont il ne faisait pas partie. Ludovic n'aimait plus son travail qu'il faisait toutefois consciencieusement mais préférait passer ses heures de loisir à jouer au tennis, sport qu'il pratiquait presque chaque après-midi près du cimetière de Port-au-Prince. Le soir il jouait au piano chez lui. Puis vint la présidence de François Duvalier et les purges dans les rangs de l'armée, les arrestations, les disparitions, les conflits. Un jour Ludovic reçut l'ordre d'aller mitrailler une cible dans une région d'Haïti où il savait qu'il n'y allait avoir que des victimes civiles innocentes. Il alla survoler la région en question à basse altitude et déchargea ses mitrailleuses dans la mer. Ceux qui ont vécu cette période comprendront qu'en agissant ainsi sous le régime de François Duvalier, Ludovic a risqué sa vie pour épargner celles de victimes anonymes. Il demanda a être mis à la retraite, ce qui fut accepté. Il avait près de vingt ans de carrière irréprochable et était, tout à son honneur, toujours simple lieutenant.

Le Corps d'Aviation était en ce moment en chute libre. C'est après le départ de Ludovic Audant qu'il allait connaître sa première vraie tragédie aérienne, avec l'écrasement en 1966 d'un DC-3 à Duchiti entre les Cayes et Jérémie, accident qui allait faire 30 victimes, surtout des gens de Jérémie, ville natale de Ludovic."> 16

Les années de contrôle aérien.

Dès sa sortie de l'armée Ludovic Audant fut engagé par la Pan American Airways comme «opérateur radio». En réalité, il s'agissait d'un travail de contrôleur aérien car Haïti n'en possédait pas vraiment. Ceux qui effectuaient ce travail étaient employés de la Pan Am, qui, alors, étant la principale compagnie aérienne à desservir Haïti, utilisait elle-même ses propres contrôleurs pour coordonner le trafic dans les airs et au sol et pour préparer les observations météorologiquesToutefois, Ludovic qui atteint déjà la cinquantaine ne touche qu'un salaire dérisoire qui ne lui permet pas de préparer une retraite confortable. Ses soldes ne l'avaient pas plus permis de mettre de l'argent de coté. Il se trouve donc un contrat pour aller passer quelques années au Congo comme instructeur. Il part seul. Il gagne là-bas, pour la première fois de sa vie, un salaire qui lui permet de vivre, d'envoyer de l'argent à sa famille restée en Haiti et d'en mettre de coté pour sa retraite. A son retour, le nouvel aéroport de Port-au-Prince était en construction et Ludovic obtient un poste de contrôleur aérien, emploi qu'il conservera jusqu'à sa retraite en 1972. Il a 61 ans.

La retraite.

Enfin retraité, Ludovic accepte, début 74, un emploi comme Administrateur du Cercle Bellevue, un Club social et sportif quelque peu élitiste que fréquentent les grands noms de la société haïtienne. En somme, il est payé pour faire ce qu'il fait de toutes les façons tous les jours: parler à ses amis, jouer au tennis et au piano. Sa retraite dorée devait être de courte durée : quatre mois plus tard, le 23 septembre 1974, à l'âge de 62 ans et sans avoir même été malade, il mourait subitement dans son lit. Il avait joué au tennis le jour même.

Je regrette de ne l'avoir pas connu.

RÉFÉRENCES

1. Pilier central

2. Le Général Thomas-Alexandre Davy Dumas (1762-1806) est né dans le canton de la Guinaudée, dépendance de la paroisse de Jérémie. Il est parti pour la France alors qu?il n?était encore qu?un enfant. Il n?est jamais retourné en Haïti. Son fils, l?écrivain Alexandre Dumas, père (1802-1870), son petit-fils l?écrivain Alexandre Dumas, fils (1824-1895) n?ont pas, à notre humble connaissance,foulé le sol d?Haïti. Il serait, toutefois, intéressant de chercher à savoir l?origine de cette famille Dumas à Jérémie en 1910.

3. Faustin Soulouque est devenu Président d'Haïti le premier mars 1847, par les méthodes habituelles. Après s'être fait nommé Président à Vie, imitant Napoléon III, il se fait sacrer Empereur 18 avril 1852 sous le nom de Faustin Premier. Il a créé une nombreuse noblesse dont le Baron Gilles Laurent Lestage. Après des rumeurs de complots, Gilles Lestage est convoqué à Port-au-Prince par son souverain. En apprenant la nouvelle, il a préféré se donner la mort plutôt que de subir la disgrâce de son monarque, disgrâce qui aboutissait toujours à une mort des plus pénibles. L'Empereur sera renversé le 15 janvier 1859.

4. savait provoquer l?hilarité. Se tordre de rire.

5. Troupes paysannes hostiles au gouvernement

6. Bowen était le nom du premier pilote à perdre la vie dans un accident d?avion en Haïti, un officier du U.S.M.C.

7. Haïti a du faire une certaine impression sur Lindbergh puisqu?il y revint à titre privé en 1929, avec son épouse.

8. Je ne peux continuer cet article en laissant au lecteur l'impression que Léon Désiré Paris fut notre premier pilote. Un jeune homme du nom de Charles Weymann, né, semble-t-il à Port-au-Prince le 8 février 1889, jeux de Moto jeux de Voiture possède cette distinction. Il était le fils d'un homme d'affaires Américain, Charles Weymann aîné et d'une demoiselle Cornélie Miot, petite-nièce du très riche Pierre Bienaimé Rivière dit Mémé. Charles Weymann obtint aux états-Unis le brevet de pilote numéro 14, tout de suite après les fameux frères Wilbur et Orville Wright qui avaient les numéros 4 et 5. Il sera le sujet d'un autre article.

9. Le Canada aurait peut-être reconsidéré s?il avait su, en 1939 qu?il allait perdre plus de 20,000 de ses fils aviateurs de 1939 à 1945.

10. En 1932, au moment où il était arrivé avec son avion, le Toussaint Louverture, Paris avait tenté de se faire intégrer à la Garde d'Haïti en tant que pilote mais il y a avait eu opposition des Marines qui contrôlaient encore la Garde et qui ne voulaient absolument pas de lui comme pilote. Tous leurs pilotes étaient des officiers blancs du US Marine Corps et la Garde d'Haïti n'avait pas vraiment de section d'aviation. Le gouvernement haïtien avait donc acheté le Toussaint Louverture et avait engagé Paris comme pilote civil du gouvernement haïtien. (Je n'ai pas pu trouver ce qui est advenu de cet avion mais j'espère que cet article va débusquer des gens qui vont me l'apprendre). Au moment de la création du Corps d'aviation au début des années 40, Paris travaillait au garage de la Garde d'Haïti et ne pilotait donc déjà plus le Toussaint Louverture. Léon Paris est mort à New York en mai 1983, à l'âge de 84 ans.

11. Aujourd?hui le College of Aeronautics.

12. Pilotes civils à l?emploi de l?armée pour le convoyage des avions vers le front.

13. Le premier général noir des Etats-Unis avait été le père de celui-ci, Benjamin Oliver Davis Sr.

14. Le DC-3 et le C-47 sont les désignations civile et militaire du même avion.

15. Cette performance est assez remarquable. Il faut prendre en considération que les pistes de Jacmel, Cayes, Jérémie et Port-de-Paix, pour ne citer que celles-ci étaient des pistes de terre d?à peine 3000 pieds (de boue en saison pluvieuse) et que les DC-3, chargés au maximum, en décollaient à des températures excédant 30 degrés Celcius. Ces facteurs en imposaient énormément aux pilotes.

16. Moins de 2 ans auparavant, en 1964, Jérémie avait été le site du massacre de plus d?une centaine de personnes, hommes, femmes et enfants, massacrés pour la plupart à Numéro Deux, la piste d?aviation de Jérémie. Cet accident allait ajouter quelques clous au cercueil de la vie économique et sociale de Jérémie, jadis si prospère et aujourd?hui presque une ville fantôme.